Le duc de Chaulnes à Richelieu, Amiens, 21 janvier 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires & Documents France, vol. 1675, f^° 176-177. Le texte original a été publié dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), La correspondance du cardinal de Richelieu : au faîte du pouvoir, l’année 1632, Paris, éditions L’Harmattan, 2007, p. 74-75.

Monseigneur,

La personne qui traite l’affaire dont vous avez été déjà informé ayant demeuré sept semaines à son dernier voyage, je n’ai pu avoir l’honneur de vous en mander aucune nouvelle. Étant donc de retour de ce matin, il m’a rapporté que le dessein d’avoir la terre continue toujours dans l’esprit de ceux qui y ont mis la première enchère, mais quelque effort qu’ils aient pu faire, ils n’ont pu avoir encore ni la somme requise, ni l’équipage nécessaire pour y faire une entrée sortable à leur condition.

Le principal retardement que j’y vois procède du peu d’assistance qu’ils reçoivent de ceux qui leur avaient promise toute entière, lesquels, comme ils ne manquent pas de volonté, mais bien de puissance, leur font toujours espérer beaucoup et, ne désirants point la rupture du traité commencé, remettent ainsi toutes choses en longueur, et, pour leur donner plus de commodité à la continuer, ils leur ont donné une place dans laquelle l’on fait présentement toutes les assemblées et tous les préparatifs nécessaires, et où il y a depuis un mois quatre ou cinq cent personnes pour servir à cette affaire. Mais je vous avoue, Monseigneur, que cette longueur m’ennuie, et n’est le commandement que j’ai reçu, j’y eusse mis une fin, parce qu’elle m’a tellement occupé depuis quelque temps que je vous puis dire que mon principal soin n’a été que celui-là. Je continuerai néanmoins toute chose jusqu’à ce que j’ai reçu quelque autre ordre, et d’autant plus que je vois tout en bon état et en bonne disposition. La personne donc qui traite la dite affaire s’en retourne demain suivant le commandement qu’elle en a. S’il arrive quelque chose qui mérite un voyage exprès d’un gentilhomme, je ne l’épargnerai pas non plus que ma vie, quand vous en aurez besoin pour votre service, vous assurant que je suis passionnément, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur, 

Chaulnes

J’oubliais à vous dire, Monseigneur, que le même gentilhomme qui était venu reconnaître la terre la première fois, y a encore fait un voyage. N’était l’espérance que j’ai que le traité prendra bonne issue, je l’eusse obligé à y demeurer jusqu’à ce que j’eusse eu votre ordre.

D’Amiens, ce 21 janvier 1632.

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