Nicolas Bautru à Richelieu, Paris, 15 septembre 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires et Documents France, vol. 805, f° 73-74. Original autographe. Suscription sur le repli : « à Monseigneur ».

Monseigneur,

J’ai reçu celle qu’il vous a plu me faire l’honneur de m’écrire, par laquelle vous témoignez être satisfait de notre petit soin. Vous me parlez de M. des Roques. Je ne l’ai pas vu depuis quinze jours, et m’a-t-on assuré qu’il vous était allé trouver à l’armée. Nul homme ne vous peut mieux informer de la capacité dudit sieur des Roques que M. de Grave, qui sera auprès de vous dans peu de jours.

Vos vingt chevaux nouveaux – savoir onze de Danemark et neuf jeunes poulains – sont arrivés au Bois-le-Vicomte le 27 août, et y ont été reçus, par l’ordre de M. des Roches¹, par M. de La Rivière, qui a eu soin de les faire traiter au meilleur ménage qu’il a pu. 

Nous avons tous deux donné ordre de les traiter de la façon que je vous disais, à savoir, Monseigneur : aux chevaux de Danemark, qui ont les uns six ans, les autres sept, et qui peuvent servir quand vous le commanderez, chacun trois picotins d’avoine et deux bottes de foing par jour ; et les jeunes poulains, ayant appris que feu M. le connétable de Montmorency, qui y était curieux, les nourrissait de son de froment, craignant que l’encolure ne leur vint trop grosse, nous leur faisons donner chacun deux mesures de son et deux poignées d’avoine par jour, et deux bottes de foing chacun avec la paille pour la litière. Nous avons fait marché pour cela à dix sous par jour les chevaux du Danemark, et à huit sous par jour les jeunes chevaux. Je m’assure que vous trouverez ce marché-là très bon. 

Il y a quatre palefreniers pour panser ces XX chevaux, auxquels on donne un quart d’écu par jour pour gage et pour nourriture. Ils avaient XX sous chez feu M. le maréchal, Mais nous les avons fait contenter à un quart d’écu le jour. M. de La Rivière a donné ordre de faire galoper quelquefois les chevaux de Danemark, et trotter les jeunes sous le caveçon. Nous irons de temps en temps voir comme ils se porteront. 

Je vous avais écrit, Monseigneur, que j’avais reçu quatre cents livres du chevalier de La Potinière² pour les quatre barbes misérables que M. le commandeur, M. le baron de Pontchâteau et moi lui avons vendus, personne n’en voulant rien donner. Je demandais si vous vouliez que l’on fît harnacher ces onze chevaux de Danemark de ces quatre cents livres, afin que, quand vous arriverez, vous les trouvassiez tout prêt à servir. Mandez-moi, s’il vous plaît, ce que je ferai sur ce sujet. Je continue toujours dans l’espérance qu’il se trouvera [sur] les quatre petits coureurs que vous avez deux propres pour Sa Majesté. Les autres, ou vous les garderez pour votre service, ou nous les vendrons à ceux qui nous viennent importuner au Bois-le-Vicomte. Les chevaux sont fort chers. M^me de Combalet et M. de La Rivière nous ont mandé des nouvelles de vos eaux. Je m’assure que vous en aurez contentement. 

Je fais état, devant que je vous aille trouver, de visiter tout cela, si bien que je vous saurai rendre réponde de ce que vous demanderez. Je prie Dieu qu’il vous conserve et qu’il me fasse la grâce que je vous rende quelque bon service. Vous faites assez l’honneur à M^me de Nogent [née Marie Coulon] de la tenir pour votre très humble servante pour que je me donne la liberté de vous dire qu’elle est toujours très mal depuis sa couche. Cela me donne bien du chagrin. Faites-moi, s’il vous plaît, l’honneur de me croire, Monseigneur, de Votre Éminence, le très humble, très obéissant, très fidèle et très obligé serviteur,

N. Bautru

Je vous fais cette dépêche en présence de M. de La Rivière, qui a grande passion pour votre service.

Le 15 septembre 1632, à Paris.

1. Le prieur des Roches, Michel le Masle. [↩]
2. Voir à son sujet le texte 346. [↩]

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