Henri de Séguiran au cardinal de Richelieu, Aix-en-Provence, 8 octobre 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires et Documents France, vol. 805, f° 108. Original autographe.

Monseigneur,

Je fais dessein, Dieu aidant, de suivre ma lettre de si près qu’à peine aura [-t-] elle l’honneur de tomber entre les mains de Votre Éminence que je serai à même temps auprès d’elle pour lui protester de vive voix que l’excès de mon ressentiment est égal, pour le moins, à celui de la joie que j’ai eue lorsqu’on m’a dit le favorable choix qu’elle a fait de ma personne en la charge de son lieutenant général de l’amirauté de Provence, charge d’autant plus importante qu’elle ne relève que de vous seul.

Je serais au désespoir, me connaissant incapable de vous en remercier dignement, si je ne savais de longue main, et avec moi toute l’Europe, que les faveurs de Votre Éminence sont si gratuites que la gloire de les faire est le seul fruit que vous vous y proposez. Je me tairai donc en un sujet auquel toutes les plus belles paroles du monde ne me sauraient jamais dégager, non pas même satisfaire, à la moindre partie de l’obligation que j’en ai à votre incomparable bonté. C’est à la Fortune, ou plutôt au Ciel, Monseigneur, duquel vous distribuez les bienfaits et les grâces avec autant d’admiration que de prudence et d’égalité, et qui vous a fourni d’un moyen si puissant aujourd’hui pour me témoigner l’honneur de vos bienveillances, de me faire naître des occasions ou saisir celles que je rencontrerai en ma charge, dans lesquelles je lui puisse faire connaître par toute sorte de très fidèles services combien je me ressens son obligé, et lequel cœur et franchise je veux être toute ma vie, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur, 

Séguiran

D’Aix, ce VIII^e octobre 1632.

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