Michel Moreau à Richelieu, Paris, 12 février 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires & Documents France vol. 802, f^° 42. Le texte original a été publié dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), La correspondance du cardinal de Richelieu : au faîte du pouvoir, l’année 1632, Paris, éditions L’Harmattan, 2007, p. 92-93.

Monseigneur,

Ce matin, les deux libelles de La Remontrance et du Caton Chrétien ont été examinés et condamnés au feu comme séditieux, avec le respect dû à votre nom et le sentiment dû aux grâces que cet État reçoit de vos soins continuels pour son utilité, sa grandeur et son repos¹.

J’envoie avec cette dépêche la copie de la sentence, laquelle sera exécutée dès cette après-dînée, et ose vous assurer que si les auteurs étaient entre nos mains, ils recevraient même punition, et que cette compagnie n’a point d’opinion mêlées lorsqu’il est question de l’obéissance et du respect dû au Roi et de votre service.

L’on travaille à la levée du scellé du feu sieur Bardeau, où j’assiste, et à ce que je puis apprendre des intéressés en l’affaire, ils le rendent redevable de plus de cinq cent mille livres. Cela se verra par discussion de cette affaire, qui sera faite très particulière. Ceux qui avaient le plus brouillé pour les rentes ont, ces jours derniers, fait une rétractation publique en l’Hôtel de Ville, en présence de plus de sept ou huit cents personnes, et ont donné à M. le maréchal d’Effiat les louanges dues à ses peines et au bien qu’il leur a fait. De sorte que Paris est en l’état qu’on le peut désirer pour le service du Roi, son nom et son autorité révérées, et le peuple plein de gratitude et de ressentiments et de respect pour vous, et d’indignation contre ceux qui causent le trouble et le désordre en l’État. L’on attend MM. du Parlement, lesquels, ce me semble, ont bien rabattu de l’humeur en laquelle ils étaient il y a quelque temps, et semblent donner lieu d’espérer que les choses seront traitées par eux à l’avenir, d’esprit plus remis et avec plus de soumission. 

C’est au vrai ce qui se passe à Paris, et les meilleures nouvelles, desquelles vous puisse donner compte la personne du monde la plus obligée de vous honorer et d’être, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur, 

Moreau

Ce jeudi 12 février

1. Le catalogue générale de la Bibliothèque nationale de France indique une seule et unique publication, la Charitable remonstrance de Caton chrestien à Monseigneur l’éminentissime cardinal de Richelieu sur ses actions et quatre libelles diffamatoires faites par luy ou ses escrivains. La notice bibliographique en ligne indique que l’œuvre a été attribuée à Mathieu de Morgues par Donald Atholl Bailey, « Les pamphlets de Mathieu de Morgues (1582-1670) : Bibliographie des ouvrages disponibles dans les bibliothèques parisiennes et certaines bibliothèques des États-Unis », Revue française d’histoire du livre, 18, premier trimestre 1978, p. 41-86. Cette publication de Mathieu de Morgues, de 1631, est la réponse au libelle de Richelieu, Remontrance à Monsieur par un Français de qualité (1631), à deux libelles de Paul Hay du Châtelet, Discours au Roy touchant les libelles faits contre le gouvernement de son Estat (1631) et L’innocence justifiée en l’administration des affaires (1631), ainsi qu’au libelle d’Achille de Harlay-Sancy, Discours d’un vieux courtisan désintéressé sur la lettre que la Reine mère du Roi a écrite à Sa Majesté après être sortie du royaume (1631), voir la page de la BnF, consultée en ligne le 15/12/2022 https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb36434730b. [↩]

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