René-Louis de Fiquelmont, abbé de Mouzon, à Richelieu, Belval, 15 mars 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires & Documents France vol. 804, f^° 75. Le texte original a été publié dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), La correspondance du cardinal de Richelieu : au faîte du pouvoir, l’année 1632, Paris, éditions L’Harmattan, 2007, p. 122-123.

Monseigneur,

Je sais bien que je ne puis vous adresser ces lignes qu’en me rendant coupable d’une témérité irrémissible, puisqu’il est vrai que je ne puis être en façon que ce soit considérable auprès de vous que par une inclination très forte que j’ai à votre service.

Et bien que je n’aie pas plus de bonheur qu’une infinité d’autres pour mériter par-là aucun rang entre ceux qui ont l’honneur d’être tenus pour vos serviteurs, je ne laisserai d’avoir recours à votre bonté pour en avoir un très humble pardon, et vous demander de plus en toute humilité la grâce de daigner vous employer à obtenir de Sa Majesté le rappel de M. de Joyeuse et la liberté de retourner de sa maison avec l’assurance qu’il vous plaira prendre de moi dans la parfaite connaissance que j’ai de ses intentions, qui n’ont et n’auront jamais d’autre but que le service de Sa Majesté et le vôtre, qu’il subira telle condition qu’on trouvera bon lui imposer, voire même jusque-là que de prendre récompense de tout ce qu’il a en Champagne partout ailleurs où on lui voudra donner dans le ressort de Paris, si ce n’est qu’il vous plaise de tirer des preuves plus digne de l’ambition qu’il a de se voir lié à votre service, à quoi vous le trouverez très disposé toutes et quantes fois que vous lui faites l’honneur de le désirer. 

N’eut été que j’ai cru que vous trouverez bon que je ne me sois éloigné de notre frontière à la prière que Messieurs de Liège m’en ont fait sur les traverses qu’on leur fait pour les empêcher de témoigner au Roi leur bonne volonté, afin de me pouvoir mander de leurs nouvelles selon leurs nécessités et en avoir des miennes, je m’aurais été jeter aux pieds de Votre Grandeur pour vous supplier très humblement de vouloir cette faveur-là audit sieur de Joyeuse et de vous en avoir l’obligation toute entière, qui sera d’autant plus grande que lui, sa femme [Marguerite de Joyeuse, comtesse de Grandpré] et une de ses filles étant indisposés de leurs santés par-delà, et leurs affaires n’allant pas mieux par-deçà en leur absence, ce sera leur faciliter un moyen de remédier à ces désordres, qui les rendra vos redevables à l’infini, et moi obligé de me dire partout et pour toujours, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur, 

René-Louis de Fiquelmont, abbé de Mouzon

À Belval, ce 15 mars 1632

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