Scarron (Paul, dit “Paul Scarron le Jeune”)

Paul Scarron le Jeune (1610-1660) est le fils de Paul Scarron l’Apôtre († 1643) et de sa première épouse, Gabrielle Goguet. Il naît trois ans après un enfant également prénommé Paul qui n’a pas survécu, et un premier fils, Pierre, prématurément disparu. Son parrain est Alexandre II d’Elbène, seigneur de La Mothe, capitaine de cinquante hommes d’armes et maître d’hôtel de la Reine, fils d’Alexandre Ier d’Elbène (1554-1613), conseiller d’État, et de Marguerite d’Elbène. Sa marraine est Marie d’Aligre, épouse de Philippe de Béthune, gouverneur de Monsieur, frère du Roi1.

Paul Scarron le Jeune, seul survivant mâle de la fratrie issue de Gabrielle Goguet, n’a que trois ans lorsque sa mère disparaît. Son père convole bientôt en secondes noces avec Françoise du Plaix, avec qui il entretient aussitôt des rapports conflictuels. 

Élevé à Charleville, il gagne Paris et entre dans les ordres en 1629. Il fréquente cependant le salon de Marion Delorme, née en 1613, chez laquelle il se lie avec Jean-François Paul de Gondi, futur cardinal de Retz, du même âge que cette dernière. 

Inquiet sans doute du mode de vie adopté par son fils, Paul Scarron l’Apôtre sollicite en vain de Richelieu, le 2 avril 1632, le prieuré clunisien de Rumilly pour son fils2. Il est finalement placé dans l’entourage de l’évêque du Mans à la fin de l’année, comme « domestique », au sens d’officier commensal s’il s’était agi du Roi3.

Paul Scarron le Jeune suit le prélat suit dans la Ville éternelle, aux côtés de l’archevêque de Lyon et de l’évêque d’Albi, Gaspard de Daillon du Lude. La validité du mariage contracté le duc d’Orléans, en janvier 1632, avec Marguerite de Lorraine, est au cœur des discussions menées par les délégations diplomatiques françaises envoyées auprès du Souverain pontife en 1633, 1634 et 1635. 

Puis Charles de Beaumanoir et Paul Scarron ayant regagné le Maine à l’issue de la mission diplomatique diligentée à Rome, le jeune secrétaire devient chanoine du chapitre de Saint-Julien du Mans en décembre 1636. Il est victime d’une paralysie des membres inférieurs après une station prolongée dans un marais en 1638. 

Le jeune homme fait, à la même époque, la connaissance d’un proche de Charles de Beaumanoir, François de Faudoas d’Averton, comte de Belin, mécène de Jean de Rotrou et de Jean Mairet, qu’il met ensuite en scène dans son Roman comique, sous les traits du marquis d’Orsé4.

Il rencontre aussi Marie de Hautefort, exilée au Mans de mars 1639 au début de l’année 1640, qui devient sa protectrice. 

Dans la veine satyrique qui le caractérise, il prend part à la querelle du Cid et propose une Suite du Cid, ou le Triomphe de son autheur en dépit des envieux, publiée à Villers-Cotterêts, « chez Martin Baston, à l’enseigne du Verd-Galand, vis-à-vis la rue des Mauvaises Paroles », sans date5

Jusqu’à la fin du règne de Louis XIII et durant la Fronde, Paul Scarron reste non seulement proche de la famille d’Elbène, en particulier du fils de son parrain, le chevalier Alexandre III d’Elbène6, mais noue peut-être des liens avec les cousins de ce dernier, Alexandre, Guy et Alphonse d’Elbène, fils de Pierre et Anne d’Elbène. Les familles Scarron et d’Elbène sont de plus toutes deux d’origine italienne. Il n’est pas exclu que Paul Scarron ait pu rencontrer en Italie l’ancien évêque d’Albi, Alphonse II d’Elbène. 

Il publie en 1659 une Seconde épistre chagrine à Monsieur d’Elbène, à Paris, chez A. Courbé, après une Épistre chagrine à Monseigneur le mareschal d’Albret

Paul Scarron le Jeune regagne Paris en 1640, à la même époque que Marie de Hautefort. En 1641, il séjourne six semaines à Bourbon-l’Archambault afin d’y prendre les eaux. L’année suivante donne lieu à une seconde cure, avec le duc d’Orléans cette fois. Les relations qu’il noue au cours de ces séjours sont pour lui l’occasion de composer deux relations, La première légende de Bourbon [1641] puis La seconde légende de Bourbon [1642], parues en 1643. Paul Scarron n’hésite pas à directement s’adresser à Richelieu afin d’obtenir la prorogation de la jouissance de son bénéfice manceau7

Grâce à Marie de Hautefort, il obtient d’Anne d’Autriche, tout juste régente, quelques subsides, d’un montant de 500 écus, transformés en pension annuelle en 1644. 

À partir de 1648, paraît Le Virgile travesti en vers burlesques qu’il dédie à la Reine. 

L’année 1651, surtout, est pour lui déterminante. Il épouse alors la jeune Françoise d’Aubigné, future marquise de Maintenon, née en novembre 1635 à la prison de Niort, où son père, Constant d’Aubigné, est détenu. Celle qui devient Madame Scarron est aussi la petite-fille du poète protestant Théodore Agrippa d’Aubigné. Le poète publie simultanément la première partie de son Roman comique, dédié au cardinal de Retz, ainsi que La Mazarinade

Paul Scarron est une figure essentielle des cercles libertins qui se constituent autour de Marion Delorme et Ninon de Lenclos. Les membres des différentes branches de la famille d’Elbène semblent tout proches, comme la figure tutélaire de Gaston d’Orléans. Paul Scarron décède le 6 octobre 1660.

Texte 609

Marie-Catherine Vignal Souleyreau

Docteur en Histoire, ingénieur d'études à Sorbonne Université, Faculté des Lettres, Institut de Recherche sur les Civilisations de l'Occident Moderne (IRCOM - Centre Roland Mousnier)

More Posts

  1. Henri Chardon, Scarron inconnu et les types des personnages du roman comique, Genève, Slatkine Reprint, 1970, 2 tomes en un volume, tome 1, p. 397-398. []
  2. Voir texte 609, Scarron à Richelieu, de Paris, 2 avril 1632, et dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau – éd. -, La correspondance du cardinal de Richelieu : au faîte du pouvoir, l’année 1632, Paris, éditions L’Harmattan, 2007, p. 143. []
  3. Article « Paul Scarron », dans cardinal Georges Grente – dir. -, Dictionnaire des Lettres françaises : le XVIIe siècle, Paris, Fayard, 1996, coll. Pochothèque, p. 1156-1159. []
  4. Henri Chardon, « La vie de Rotrou mieux connue – suite – », Revue historique et archéologique du Maine, tome quatorzième, année 1883 second semestre, article consulté en ligne le 20/08/2023. []
  5. L’opuscule figure au catalogue de la Bnf sous la cote RES-Z—358(53). []
  6. Michel Vergé-Franceschi, Ninon de Lenclos : libertine du Grand Siècle, Paris, Payot, 2014, p. 291. []
  7. « Requête du petit Scarron au grand cardinal de Richelieu », 31 octobre 1642, conservée à la BnF, département des Manuscrits occidentaux, coll. Clairambault, vol. 1165, f° 165. []

OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Marie-Catherine Vignal Souleyreau (27 avril 2023). Scarron (Paul, dit “Paul Scarron le Jeune”). Correspondance et papiers d'État du cardinal de Richelieu. Consulté le 16 février 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/tqh7


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.