Pierre Monod (1586-1644), de la Compagnie de Jésus, est à la fois conseiller d’État et historiographe de la Maison de Savoie (1632). Il se fait connaître en publiant à Lyon, en 1621, des Recherches historiques sur les alliances de France et Savoye. Il prône alors un rapprochement de la cour de Turin et de la cour de France. Recteur du collège des jésuites de Turin de 1626 à 1628, il devient le conseiller du duc Charles-Emmanuel I^er1.

Également confesseur de la sœur de Louis XIII, Christine de France, qui a épousé, en 1619, Victor-Amédée de Savoie, il s’impose aussi comme le directeur spirituel de ce dernier, devenu duc de Savoie à la mort de son père, Charles-Emmanuel I^er, en 1630.

En 1631, Pierre Monod est envoyé en mission diplomatique auprès du roi de France.

En 1633, dans les mois qui suivent l’auto-proclamation du duc de Savoie au titre de roi de Chypre, il publie encore, à Turin, un Trattato del titolo regio dovuto alla Serenissima Casa di Savoia…, destiné à soutenir les prétentions de Victor-Amédée I^er contre celles de Venise. Pierre Monod formule non seulement la justification des aspirations royales du duc de Savoie, mais assure aussi plus largement la défense de ses prérogatives de souverain face à l’Empire, à l’Espagne ou à la France. Il est ainsi encore l’auteur d’un Essai historique… dans lequel il fait voir que la Savoie n’est point et n’a jamais été fief d’Empire ((Sven Externbrink, « L’Espagne, le duc de Savoie et les “Portes” : la politique italienne de Richelieu et de Louis XIII », dans Giuliano Ferretti (dir.), De Paris à Turin, Christine de France, duchesse de Savoie, Paris, éditions L’Harmattan, 2014, p. 15-33, voir p. 28 note 57.)).

Entre décembre 1636 et mai 1637, il est envoyé pour la seconde fois à Paris pour renforcer l’alliance franco-savoyarde dans le contexte de l’entrée en guerre ouverte de la France contre l’Espagne, et d’importants revers subis par Louis XIII durant les mois précédents. Pierre Monod ne parvient pas à obtenir de la France la reconnaissance de la qualité royale pour le duc de Savoie et s’attire surtout la méfiance de Richelieu qui le soupçonne d’avoir trempé dans le complot ourdi par le père Caussin.

Après le décès du duc Victor-Amédée I^er, le 7 octobre 1637, Pierre Monod, prend la tête d’un parti soucieux de ménager l’Espagne dans l’entourage de la duchesse de Savoie et, face à la faction pro-française menée par le comte Philippe d’Agliè, il incite la veuve de Victor-Amédée I^er, régente du duché de Savoie, à tenter de trouver un accord avec le comte-duc Olivares. La position du comte d’Agliè l’emporte lors du conseil ducal du 22 février 1638, une alliance défensive avec la France est décidée. L’ambassadeur de France en Savoie, Michel Particelli d’Hémery, informe Richelieu que Pierre Monod s’est prononcé pour la neutralité. Mais le cardinal-ministre, estimant la France trahie, obtient le renvoi du jésuite. Le 27, il est assigné à résidence à Chieri puis à Cuneo.  

Au début de l’été suivant, la duchesse de Savoie confirme son adhésion au traité de Rivoli, renouvelé jusqu’en 1640. Ayant tenté de prendre la fuite, le père Monod, sur ordre de Richelieu, est arrêté et emprisonné au château de Montmélian. Il est transféré à Miolans le 18 mai 1640, et y décède le 30 mars 1644.

Voir Frédéric Ieva, La diplomatie savoyarde au cœur de l’Europe : Savoie-Piémont et France au temps de Victor-Amédée I^er et de Christine de Bourbon (1630-1648), thèse de doctorat à l’université de Grenoble-Alpes, sous la direction de Giuliano Ferretti, soutenue le 5 juin 2020, p. 259-283 ;

Voir aussi Sven Externbrink, « Conserver la souveraineté. Le duché et l’alliance française pendant la guerre de Trente Ans, 1635-1659 », dans Giuliano Ferretti (dir.), L’État, la cour et la ville. Le duché de Savoie au temps de Christine de France (1619-1663), Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 145-166 ;

Géraud Poumarède, « Deux têtes pour une couronne : la rivalité entre la Savoie et Venise pour le titre royal de Chypre au temps de Christine de France », Revue XVII^e siècle, n° 262, 2014/1, p. 53-64 ;

Domenico Valle, « Il padre Pietro Monod della Compagnia di Gesù, consigliere di Stato e istoriografo della casa di Savoia e le sue relazioni col cardinal Richelieu », Miscellanea di Storia italiana, 3^e série, n° 14, 1910, p. 269-366 ;

Madeleine Haehl, Les Affaires étrangères au temps de Richelieu : le secrétariat d’État, les agents diplomatiques (1624-1642), Bruxelles, Bern, Berlin…, P.I.E. Peter Lang, 2006, p. 265-266.

Texte 623,

1. Frédéric Ieva, « Le Prémont entre la Régence et la Guerre civile. Deux conseillers de la cour de Christine : Pierre Monod et Philippe d’Agliè », Giuliano Ferretti (dir.), De Paris à Turin, Christine de France, duchesse de Savoie, Paris, éditions L’Harmattan, 2014, p. 105-120. [↩]

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