Marguerite Courtin, dame de Vantelet (ou Ventelet, Vautelet) par son mariage, est la fille de Pierre Courtin († avant 1612), seigneur de L’Hostel-du-Bois, et de Diane de Mary, sous-gouvernante et dame d’atour d’Henriette-Marie de France en 1612, qui teste le 2 janvier 1631¹. Elle épouse, en 1617, Jacques de Lux, seigneur de Vantelet. M^me de Vantelet est, comme sa mère, très tôt attachée à la suite de la reine d’Angleterre, Henriette Marie de France, tandis que M. Vantelet est employé dans la suite de la Reine, d’abord comme écuyer, puis comme « gentilhomme huissier » à la date de 1629².

Selon le comte de Baillon, Monsieur de Vantelet est le chambellan de la reine d’Angleterre³.

Dès 1625, le souverain Stuart s’éloigne des intérêts de sa belle-famille, tandis que la reine Henriette-Marie, sœur du roi de France, peu encline à la tolérance vis-à-vis de son environnement anglican et volontiers ostentatoire dans ses dévotions, est victime de vexations répétées. En 1626, son entourage français est écarté par Charles I^er. Madame de Vantelet est l’une des seules à être autorisée à rester, avec Madame Coignet, née Élisabeth Garnier, et leurs maris respectifs.

Madame de Vantelet accède à la charge de première femme de Chambre d’Henriette Marie de France.

En 1629-1630, elle est impliquée, en compagnie de Walter Montaigu et de Henry Rich, comte de Holland, dans la conspiration orchestrée par la duchesse de Chevreuse et le marquis de Châteauneuf, ambassadeur extraordinaire de Louis XIII à Londres au mois de mai 1629, afin d’écarter le grand trésorier Richard Weston et d’obtenir la nomination de François de Rochechouart, dit le chevalier de Jars, comme ambassadeur ordinaire de France à Londres en remplacement du marquis de Fontenay-Mareuil. Le complot visait également à organiser la fuite de Marie de Médicis en Angleterre⁴. Il se donnait enfin pour objectif de placer auprès de la jeune reine des femmes susceptibles de défendre les intérêts du roi de France auprès de Charles I^er, parmi lesquelles Madame de Vantelet, pensionnée par Louis XIII.

Or la journée des Dupes bouleverse les relations nouées entre les cours de France et d’Angleterre⁵. Madame de Vantelet échange alors une correspondance suivie avec le marquis de Châteauneuf, dont une partie est retrouvée parmi les papiers de ce dernier⁶. De nombreux expatriés français à Londres, dont, pour la seconde fois, Madame de Vantelet, son époux et leurs parents respectifs, ne devaient leur situation qu’à Marie de Médicis. La première femme de Chambre de la Reine devient alors l’intermédiaire entre les adversaires de Richelieu et la souveraine, plusieurs lettres de sa main retrouvées ultérieurement dans la correspondance du marquis de Châteauneuf en attestent. En avril 1632, Madame de Vantelet se défend d’ailleurs directement auprès du cardinal-ministre, arguant des calomnies dont elle a fait l’objet⁷. Le chevalier de Jars, ainsi que le marquis de Châteauneuf, devenu garde des sceaux, sont arrêtés en France au début de l’année 1633. La reine d’Angleterre s’oppose alors fermement aux demandes de renvoi formulées par Louis XIII à l’encontre de Madame de Vantelet⁸. 

Fin mai – début juin 1634, Jacques d’Angennes, marquis de Poigny, envoyé en ambassade ordinaire à Londres, après une vacance de poste d’un an consécutive du complot précédent, reçoit pour instructions de tenter de regagner Madame de Vantelet à la cause de Richelieu, et par son intermédiaire, se ménager l’appui de la Reine auprès de son époux : « il [le marquis de Poigny] verra la reine de la Grande-Bretagne en particulier : il l’assurera de nouveau de la continuation de l’amitié que le Roi a toujours eue pour elle, et lui dira que Sa Majesté se promet bien qu’elle ne diminuera point celle qu’elle lui a toujours fait paraître, qu’elle suivra les bons conseils qui lui sont donnés de sa part, et qu’elle apportera les mêmes soins qu’elle a fait par le passé pour entretenir la bonne intelligence entre la France et l’Angleterre. Il la trouvera peut-être un peu froide et avec moins d’affection pour le Roi qu’elle ne devrait avoir, mais il saura que ce mal ne procède pas d’elle-même, et qu’elle y a été portée par les mauvais conseils qui lui ont été donnés par des personnes qui n’ont jamais eu l’esprit porté qu’à brouiller. Le premier qui a commencé à troubler celui de cette princesse a été le chevalier de Jars, lequel s’étant joint avec le sieur de Châteauneuf lorsqu’il fut ambassadeur en Angleterre, firent entendre beaucoup de choses à la dite Reine, et lui diminuèrent les bons sentiments qu’elle devait avoir pour la France. Ils se servaient de la Vantelet, qui est sa première femme de chambre, pour lui faire dire toutes les choses qu’ils avaient envie qu’elle sût, et cela leur réussit si bien qu’ils l’attirèrent tout à fait à leur cabale, et la portèrent à la ruine du grand trésorier [Lord Richard Weston], et à faire quantité d’autres choses qui ne leur ont non plus réussi que celle-là, et ont donné juste sujet au Roi d’avoir des soupçons contre eux. Depuis la prise du sieur de Châteauneuf et du chevalier de Jars, la Vantelet a toujours continué dans les mauvaises pensées qu’elle avait eues pendant leur séjour en Angleterre, ce qui a obligé le Roi à lui faire un traitement tel que sa conduite méritait. Il lui a fait rayer sa pension, et avait fait poursuivre le roi d’Angleterre et le grand trésorier de la chasser d’auprès de la Reine, ce qu’ils avoient plusieurs fois promis, sur ce qu’on leur avait fait voir des mauvais desseins de ladite Vantelet, mais ils ne l’ont pas exécuté, à cause que la Reine s’est opiniâtrée à la maintenir, et qu’ils n’ont pas voulu ouvertement la choquer en cette occasion. Ledit sieur de Poigny considérera si ladite Vantelet est toujours dans la même humeur qu’elle a été par le passé, et s’il voit qu’elle puisse revenir dans les bons sentiments. […] En un mot on laisse à la prudence dudit sieur ambassadeur de connaître si ladite Vantelet est capable de se remettre à bien servir ou non, et selon cela prendre ses mesures pour la faire chasser ou regagner au service du Roi. Si le dernier se fait, elle ne manquera pas de prier qu’on la rétablisse dans sa pension, ce que ledit sieur de Poigny lui fera espérer peu à peu, et lui promettre que, pourvu qu’elle veuille bien et fidèlement agir auprès de la Reine, le Roy oubliera ce qui s’est passé, et fera volontiers du bien à elle et à son mari. Le dit sieur ambassadeur se servira d’elle ensuite pour la faire parler à la Reine, et lui mettre peu à peu dans l’esprit la conduite qu’il est nécessaire qu’elle tienne pour être utile au Roy, et pour faire que les choses qu’il désirera justement réussissent à son contentement. »⁹. 

Madame de Vantelet, comme la reine, est regagnée à la cause française en mai 1635, avec l’entrée en guerre ouverte de la France contre l’Espagne¹⁰.

Dès 1636, Madame de Vantelet apparaît à l’état des pensions allouées par le roi de France à des personnalités étrangères ou des personnalités françaises servant sa cause à l’Étranger, comme bénéficiaire de la somme de 2 000 livres tournois. Elle est encore bénéficiaire de la même somme en 1642¹¹.

Madame de Vantelet et la reine Henriette-Marie subissent alors les aléas de la guerre civile. La première femme de chambre accompagne sa maîtresse aux Provinces-Unies, autant pour accompagner la fille du roi et de la reine d’Angleterre, Marie Henriette, née en 1631, promise au prince Guillaume II d’Orange-Nassau, que pour échapper aux menaces qui guettent la souveraine de confession catholique. Sur le modèle des instructions délivrées au comte de Poigny en 1635, le comte de Chavigny écrit à l’ambassadeur extraordinaire du roi de France en Angleterre, le marquis de La Ferté-Imbault, le 1^er  août 1642 : « il n’est que bien à propos que vous teniez la reine de la Grande-Bretagne bien persuadée, par le moyen de Madame de Ventelet, des bonnes intentions que vous avez pour l’accommodement [du roi d’Angleterre avec le Parlement] »¹². Madame de Vantelet semble alors proche du diplomate et de son épouse, née Catherine Blanche de Choiseul-Praslin. Le 21 août 1642, elle écrit à son tour au marquis de La Ferté-Imbault pour se plaindre de la situation en Angleterre, qui les contraigne, elle et la reine, à demeurer à l’Étranger, et qui l’empêche de rendre auprès de la marquise de La Ferté-Imbault, malade¹³.

Elle suit encore la Reine en exil en 1644, d’abord à Exeter, où Henriette-Marie donne naissance à une autre fille, prénommé, comme elle, Henriette (épouse, en 1661, du frère de Louis XIV, Philippe, duc d’Orléans), puis à Paris.

Du mariage de Marguerite Courtin et de Jacques de Lux de Vantelet naît un fils, Charles de Lux de Vantelet, qui épouse, en 1647, Marie Coignet, à son tour au service de la reine d’Angleterre, fille de Jacques Coignet, gentilhomme huissier d’Henriette-Marie, comme Monsieur de Vantelet, et comme lui pensionné par le roi de France et par le roi d’Angleterre¹⁴, et d’Élisabeth Garnier, nourrice et première femme de chambre d’Henriette-Marie de France. Leur fille, Jeanne de Lux de Vantelet, épouse quant à elle, en 1653, Jean-Baptiste de Mezières de Lepervanche¹⁵.

Texte 670,

1. Le document est conservé au Minutier central des Archives Nationales, cote MC/ET/XXIV/331, voir les Minutes et répertoires du notaire Jean II Chappelain, janvier 1630 – décembre 1640 (étude XXIV), voir ici. [↩]
2. Voir Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), Lettres, instructions diplomatiques et papiers d’État du cardinal de Richelieu, Paris, Imprimerie Nationale, 1853-1877, en 8 volumes, Collection des documents inédits de l’histoire de France, tome III, p. 422 note. Monsieur de Vantelet se voit accorder une pension de 2 000 livres par Louis XIII en 1629, dans le cadre de sa charge en Angleterre. Avenel précise qu’il est aussi porté, avec le titre de gentilhomme huissier, sur un état des gratifications accordées par le roi d’Angleterre aux personnes attachées à la Reine et qu’on envisage de renvoyer en France. [↩]
3. Le comte de Baillon (éd.), Lettres inédites de Henriette Marie de France, reine d’Angleterre, deuxième édition revue, Paris, Émile Perrin, 1884, p. 11 note. [↩]
4. Sophie Guérinot-Nawrocky, Les réseaux d’information et la circulation des nouvelles autour de l’exil de Marie de Médicis (1631-1642), thèse de doctorat d’histoire, soutenue à l’université de Paris-Sorbonne (Paris IV), dir. L. Bély, 2011, p. 129 ; déclaration du chevalier de Jars, 25 mars 1633, dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), Richelieu à la conquête de la Lorraine: correspondance, 1633, Paris, éditions L’Harmattan, 2010, p. 153-155. [↩]
5. Voir Sarah Wolfson, “The Female Bedchamber of Queen Henrietta Maria : Politics, Familial Networks and Policy (1626-1641)”, Nadine Akkerman et Birgit Houben (dir.), The Politics of Female Household : Ladies-in-Waiting across Early Modern Europe, Leiden and Boston, Brill, 2013, p. 311-341. [↩]
6. Ibidem. [↩]
7. Marguerite Courtin, dame de Vantelet, à Richelieu, Londres, 27 avril 1632, translation publiée en ligne, texte 670. [↩]
8. Sarah Wolfson, contribution citée. [↩]
9. Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), tome IV, p. 559-566, d’après le document manuscrit conserva au Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Correspondance Politique Angleterre, volume 44, f° 231 ; voir aussi Madeleine Haehl, Les Affaires étrangères au temps de Richelieu : le secrétariat d’État, les agents diplomatiques (1624-1642), Bruxelles, Bern, Berlin…, P.I.E. Peter Lang, 2006, p. 296. [↩]
10. Voir Maxim Boyko, « Richelieu face aux turbulences révolutionnaires en Angleterre (1637-1642) » », Histoire, Économie & Société, 42^e année, 2023/1, p. 7-27, voir p. 11. [↩]
11. Madeleine Haehl, Les Affaires étrangères au temps de Richelieu…, ouvrage cité, p. 296, d’après l’état des pensions de 1642 conservé au Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires & Documents France, vol. 288, f° 253-258. [↩]
12. Cité par Raphaël Marteau, L’ambassade de Jacques d’Estampes, marquis de La Ferté-Imbault, en Angleterre (juillet 1641-septembre 1642) : information et pratiques d’un résident à l’époque moderne, mémoire de master I d’Histoire, sous la direction de Charles Giry-Deloison, soutenu à l’École Normale Supérieure de Lyon, en 2018, p. 33, mémoire disponible en ligne, consulté le 23/09/2023. [↩]
13. Raphaël Marteau, mémoire cité, p. 32-33, p. 48 et p. 74. [↩]
14. Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), ouvrage cité, tome III, p. 422 note. [↩]
15. Le contrat de mariage est conservé au Minutier central des Archives nationales, sous la cote MC/ET/LXXXIII/77, minutes et répertoires du notaire François II Ogier, 14 mai 1632 – 25 janvier 1681 (étude LXXXIII), voir ici. [↩]

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