François d’Alpheston (1601-1633) est le fils de Pierre d’Alpheston. Il se déclare en 1633 seigneur de Joyeuse, écuyer, ancien lieutenant criminel à Vitry-le-François et un temps bailli de l’évêque de Châlons-en-Champagne1. François d’Alpheston a servi dans les gardes du défunt maréchal de Marillac. Il a séjourné à Bruxelles et a été nourri soit dans la maison de Marie de Médicis, soit dans celle du père Chanteloube. Il arrive à Metz au début du mois de septembre 1633, à la demande du père Chanteloube, dans l’intention de faire assassiner Richelieu par deux soldats qui l’accompagnent2.
Dénoncé par ces deux soldats, il est rapidement arrêté.
Le 15 septembre, Louis XIII donne ordre au parlement de Metz d’instruire son procès3. La cour doit examiner le fait de conspiration contre le cardinal, qui constitue un crime de lèse-majesté au second degré. Le prévenu, par ailleurs chargé d’acheminer les dépêches échangées par le duc de Lorraine et le duc d’Orléans, est aussi accusé d’avoir assassiné à Void, près de Toul, un autre porteur de dépêches, Clerbourg4. Huit jours après l’arrestation d’Alpheston, le 22 septembre, le Parlement déclare l’accusé coupable des crimes qui lui sont reprochés et le condamne à mort. L’arrêt est signé sur les registres par Antoine de Bretagne, premier président, Nicolas Rigault et Guillaume Fremyn5. François d’Alpheston est exécuté.
On trouve, dans le compte-rendu d’information faite par le parlement de Metz pour instruire le procès du père Chanteloube, à la date du 12 octobre 1633, les précisions suivantes : « Alpheston était monté sur un grand cheval hongre gris pommelé, lequel cheval ledit déposant a vu souventes fois dans les écuries de la Reine mère du Roi en ladite ville de Bruxelles, et était ledit cheval communément nommé Le Grand Hongre ou Polacre, et a vu diverses fois plusieurs officiers de ladite dame Reine montés sur ledit cheval et particulièrement le nommé Clément, l’un des valets de chambre de ladite dame Reine, lequel aurait fait sur icelui deux voyages l’été dernier de Bruxelles à Pougnes pour faire venir des dames pour la Reine et sait ledit déposant que comme lui et ledit Alpheston et encore le nommé Saulcyer étaient sur les termes de partir de Bruxelles pour s’en venir en France, ledit cheval ayant été pris par l’un des officiers de la dame duchesse d’Avaur pour aller au-devant de la princesse Margueritte de Lorraine qui venait de Nancy à Bruxelles, l’on envoya dudit Bruxelles jusqu’à Namur requérir le dit cheval pour le bailler audit Alpheston […] »6. Le cheval de François d’Alpheston est à nouveau évoqué par Antoine de Bretagne en janvier 1634, l’animal ayant été envoyé à Paris, sur ordre exprès de Richelieu, pour compenser les frais de justice7.
Les pièces réunies lors de l’instruction sont jointes, en juillet 1634, aux pièces réunies lors du procès intenté à Blaise Rouffet, prétendu baron de Chavagnac, et au dossier réuni à charge contre le père Chanteloube, convaincu d’avoir suscité les tentatives d’attentat avorté contre Richelieu8.
Et le cheval est renvoyé par Louis XIII à sa mère, à la suggestion du cardinal-ministre lui-même, soulignant la responsabilité indirecte de Marie de Médicis dans l’affaire9…
- Procès-verbal des interrogatoires du procès de François d’Alpheston, 17 septembre 1633, dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau – éd. -, Richelieu à la conquête de la Lorraine. Correspondance : 1633, Paris, éditions L’Harmattan, 2010, p. 440-444. [↩]
- Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), Le trésor pillé du Roi : correspondance du cardinal de Richelieu, année 1634, Paris, éditions L’Harmattan, 2013, 2 volumes, tome 1, p. 552, note 1073. [↩]
- Procès-verbal des interrogatoires du procès d’Alpheston, 17 septembre 1633, dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), Richelieu à la conquête de Lorraine…, ouvrage cité, p. 440-444. [↩]
- Extrait de l’information faite le 16 septembre par MM. Rigaut et Fremin […], dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), Richelieu à la conquête de Lorraine…, ouvrage cité, p. 449-454. [↩]
- Acte de condamnation d’Alpheston, 22 septembre 1633, dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau – éd. -, Richelieu à la conquête de Lorraine…, ouvrage cité, p. 467-468. [↩]
- Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), Richelieu à la conquête de la Lorraine…, ouvrage cité, p. 610. [↩]
- Antoine de Bretagne à Léon Bouthillier, comte de Chavigny, 19 janvier 1634, dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), Le trésor pillé du Roi…, ouvrage cité, tome 1, p. 201-203. [↩]
- Voir les extraits des registres du parlement de Metz, 7 juillet 1634, Marie-Catherine Vignal Souleyreau – éd. -, Le trésor pillé du Roi…, ouvrage cité, t. 2, p. 20-23 ; voir aussi t. 1, p. 72-73. [↩]
- Voir le Mémoire [de Richelieu] envoyé au Roi sur le sujet du voyage du sieur de Villiers-Saint-Genest, de Fontenay, le 8 novembre 1633, dans Denis-Louis-Martial Avenel (éd.), Lettres, instructions diplomatiques et papiers d’État du cardinal de Richelieu, Paris, Imprimerie Nationale, 1853-1877, en 8 volumes, Collection des documents inédits de l’histoire de France, tome IV, p. 498-499 ; voir aussi Maximin Deloche, La Maison du cardinal de Richelieu : document inédit, Paris, Honoré Champion, 1912, p. 310-311. [↩]
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Marie-Catherine Vignal Souleyreau (15 octobre 2023). Alpheston (François d’). Correspondance et papiers d'État du cardinal de Richelieu. Consulté le 6 février 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/tqnn