Anne-Marie-Louise d’Orléans (1627-1693), dite « Mademoiselle » puis « Grande Mademoiselle » (en raison de sa haute taille),  duchesse de Montpensier, est la fille de Gaston Jean-Baptiste de France, duc d’Orléans, et de sa première épouse, Marie de Bourbon-Montpensier, « princesse souveraine de Dombes, duchesse de Montpensier, de Beaupréau, de Saint-Fargeau, de Châtellerault, dauphine d’Auvergne, princesse de La Roche-sur-Yon, de Luc, marquise de Mézière, baronne de Beaujolais, de Thiern et de La Roche-en-Régnier, comtesse d Bar-sur-Seine et de Mortain […] »¹ décédée le 4 juin 1627, une semaine après la naissance de sa fille, en lui laissant une fortune considérable.

Durant l’exil de son père, qui lui portait peu d’affection, Mademoiselle est élevée à la cour. À partir de 1633 ou 1634, elle reçoit l’enseignement du maître de musique de son père, Étienne Moulinié (1599-1676)². En février 1635, à peine âgée de huit ans, Mademoiselle, témoignant déjà de son goût pour les arts et pour la danse, est à l’origine d’un ballet donné en hommage au Roi, les Quatre Monarchies chrétiennes, dont les vers sont écrits par Tristan L’Hermite, exilé avec le duc d’Orléans. Comme en signe d’une conscience politique précoce, elle y incarne Minerve, allégorie de la France, où elle présente symboliquement au souverain des armes supposées le rendre invincible, et témoigne ainsi de la soumission de son père à Louis XIII³.

Parmi les biens légués par sa mère, le château de Champigny-sur-Veude, résidence des ducs de Montpensier, situé à peu de distance de celui de Richelieu, est cédé à la même date, sous la contrainte, par Monsieur, usufruitier de son épouse décédée et tuteur de sa fille mineure, au cardinal-ministre, en échange de Bois-le-Vicomte, au grand dam de Mademoiselle. Richelieu fait raser la bâtisse au frais du duc d’Orléans afin qu’aucun édifice proche ne porte ombrage au sien⁴. Il n’épargne que la chapelle, fondée par Saint Louis, dont le Pape refuse la destruction en raison de sa qualité.

En 1637, le duc d’Orléans reçois sa fille au château de Blois : « ensemble, ils jouent au volent, il lui offre des cadeaux, une montre émaillée, qui est la spécialité de Blois à cette époque, une petite guenon pour la distraire »⁵.

Elle joue un rôle important pendant la Fronde, et s’illustre en faisant prendre la ville d’Orléans et, le 2 juillet 1652, lors de « l’affaire des canons de la Bastille », au cours de laquelle elle fait tirer sur les soldats du Roi, son cousin⁶.

Elle est émancipée en 1650⁷, et séjourne surtout en son château de Saint-Fargeau, en raison de sa mésentente avec sa belle-mère, née Marguerite de Lorraine⁸. En 1655, Mademoiselle note que son père vieillit et en 1659 relève même « son état dépressif »⁹.

En 1660, elle rend visite, peut-être symboliquement, à Marie-Félice des Ursins, veuve du duc Henri II de Montmorency, exécuté en 1632 après la bataille de Castelnaudary¹⁰.

Elle entretient enfin une liaison avec Lauzun.

Elle a laissé de précieux Mémoires.

Voir aussi Christian Bouyer (éd.), Mémoires de la Grande Mademoiselle, Paris, Librairie Fontaine, 1985, 2 volumes ; Jean Garapon, La Grande Mademoiselle mémorialiste, une autobiographie dans le temps, Genève, Droz, 1989.

Texte 690,

Marie-Catherine Vignal Souleyreau

Docteur en Histoire, ingénieur d'études à Sorbonne Université, Faculté des Lettres, Institut de Recherche sur les Civilisations de l'Occident Moderne (IRCOM - Centre Roland Mousnier)

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1. Pierre Gatulle, Gaston d’Orléans, entre mécénat et impatience du pouvoir, Seyssel, Champ Vallon, 2012, p. 88. [↩]
2. Pierre Gatulle, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 152-153. [↩]
3. Voir Pierre Gatulle, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 147, p. 150-151 et p. 156 ; Jean-Marie Constant, Gaston d’Orléans, prince de la liberté, Paris, Perrin, 2013, p. 156. [↩]
4. Pierre Gatulle, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 155-156 ; Joseph Bergin, Pouvoir et fortune de Richelieu, Paris, Robert Laffont, 1987, p. 131-132. [↩]
5. Jean-Marie Constant, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 227. [↩]
6. Pierre Gatulle, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 342 ; voir aussi Jean-Marie Constant, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 203. [↩]
7. Pierre Gatulle, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 52. [↩]
8. Jean-Marie Constant, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 361. [↩]
9. Jean-Marie Constant, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 366. [↩]
10. Jean-Marie Constant, Gaston d’Orléans…, ouvrage cité, p. 42. [↩]