Marguerite de Gonzague (1591-1632), duchesse de Lorraine, est la fille du duc Vincent I^er de Mantoue et d’Éléonore de Médicis, sœur cadette de la reine mère. Elle épouse, en 1606, le comte de Vaudémont et marquis de Pont-à-Mousson, qui devient duc de Lorraine sous le nom d’Henri II le Bon. De leur mariage sont issues deux filles, les princesses Nicole et Claude, qui épousent leurs cousins germains, Charles de Vaudémont, devenu duc Charles IV de Lorraine, et Nicolas-François, initialement destiné à la cléricature. Alors même que l’armée française s’empare de Moyenvic et que Monsieur de Saint-Étienne est chargé de négocier, l’héritier du duc Charles de Gonzague, le duc de Rethélois, décède. Comme Marie de Médicis, le roi de France prend la défense des droits de Marguerite de Gonzague, et de Marie Louise de Gonzague sur le duché de Mantoue.

La première sollicite, en 1625, l’appui du cardinal-ministre. Louis XIII et Richelieu sont déjà intervenus pour la sauvegarde des intérêts de la duchesse douairière de Lorraine. On trouve en effet parmi les papiers laissés par Valentin Conrart, et conservés aujourd’hui à la bibliothèque de l’Arsenal, un Mémoire des intérestz que le Roy a que le duché de Lorraine tombe en quenouille, avec un advis à la duchesse douairière de ce qu’elle doibt et peut faire pour se maintenir contre le comte de Vaudémont, rédigé en 1625¹.

À la suite du mariage de Nicole de Lorraine et de son cousin Charles de Vaudémont, la duchesse douairière, pour protéger les intérêts de ses filles, et les siens propres, envisageait de marier sa cadette, Claude, à un prince puissant. François de Vaudémont et son fils Charles s’opposaient au principe de succession féminine revendiquée par la veuve d’Henri II, qui aurait voulu les écarter de la couronne ducale. En cas de décès prématuré de Nicole sans héritier, celle-ci serait en effet passée à Claude et à son mari. L’attitude de Marguerite de Gonzague était d’autant plus gênante en 1625 que le mariage de Charles et Nicole demeurait stérile.

Les projets de Marguerite de Gonzague et sans doute sa maladresse ont précipité les événements et accéléré la mainmise sur la couronne ducale des Vaudémont. Courant 1625, Louis XIII et Richelieu ont transmis à la duchesse douairière le mémoire de Valentin Conrart relatif à la succession au duché de Lorraine afin de lui permettre de défendre sa position et celle des princesses Nicole et Claude.

Au début de l’année 1626, à la suggestion de Richelieu², Marguerite de Gonzague tente de prouver que le testament de René II exhumé dans les archives de la maison de Guise est un faux. Outre le vice de forme, elle invoque l’inaliénabilité des États lorrains et de leurs coutumes. Elle récuse également toute légitimité ou valeur à une décision des états généraux touchant au principe de souveraineté. Elle souligne même les contradictions des prises de position successives de l’assemblée par allusion à la reconnaissance de la princesse Nicole au moment du décès du duc Henri II et à la succession des duchés dans la famille d’Anjou. Séquestrée dans le duché de Lorraine, où les officiers refusent de recevoir ses plaintes, et dans l’impossibilité de se rendre en France ou dans un État voisin et ami, la duchesse douairière accorde procuration à Justiniano Priandi, résident du duc de Mantoue à Paris, pour faire rendre la justice. Mais elle ne sollicite ni l’intervention directe du roi de France en tant que suzerain des ducs de Bar, ni celle de l’Empereur en tant que suzerain des ducs de Lorraine. Marguerite de Gonzague perçoit-elle le danger auquel seraient exposés les duchés si elle appelait directement à son secours un souverain voisin ? Elle se borne à solliciter une assistance juridique, non un secours armé. En réponse aux menées de Marguerite de Gonzague, et à la résistance de Nicole de Lorraine, le secrétaire d’État de Charles IV, Michel Thévenin, rédige en 1626 un traité établissant la légitimité de la succession en ligne masculine dans le duché de Lorraine, qui justifie le procédé des princes de Vaudémont³. La duchesse douairière de Lorraine décède au mois de février 1632.

Textes 8, 13, 15, 21, 22, 23, 24, 786, 

Marie-Catherine Vignal Souleyreau

Docteur en Histoire, ingénieur d'études à Sorbonne Université, Faculté des Lettres, Institut de Recherche sur les Civilisations de l'Occident Moderne (IRCOM - Centre Roland Mousnier)

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1. Le document a été publié par le comte d’Haussonville, dans Histoire de la réunion de la Lorraine à la France…, 2^e édition, Paris, 1854-1859, 4 vol., tome I, pièces justificatives, p. 465. [↩]
2. Le comte d’Haussonville, Histoire de la réunion de la Lorraine à la France… op. cit., tome I, pièces justificatives, p. 465. [↩]
3. Bibliothèque de l’Institut, coll. Godefroy, vol. 340, f° 1-40. [↩]