Notice rédigée par Monsieur Charles-Henri de Sommyèvre

Ces Beaujeu sont originaires du bourg homonyme en Haute-Saône¹. C’est une ancienne maison chevaleresque naturellement versée dans le métier des armes dans lequel elle ne manqua jamais de se distinguer. À la suite de l’extinction des branches aînées, la branche cadette qui nous intéresse ici, en dépit d’une fortune amoindrie, rendait toujours de bons services militaires.

Amplement étudiées, même si les études sont de qualité très variable, les Beaujeu sont assez bien connus. Néanmoins, Ludovic de Beaujeu, seigneur de Jaulges (Yonne), sous ce prénom de Ludovic, n’apparaît nulle part ailleurs que dans le témoignage dont il va être question. Il y est porté âgé de trente ans environ (et donc né vers 1602) et gendarme de la compagnie du duc d’Orléans. Il ne peut être que Louis – Ludovic est un dérivé de Louis – de Beaujeu, cinquième enfant et quatrième garçon, Selon l’ordre donné dans le testament de son père, de Jean [V] de Beaujeu, seigneur de la Tuilerie (fief à Jaulges), et de Catherine de Saint-Blaise, dame de Lézinnes et Pouy-sur-Vannes en partie, qui s’étaient mariés par contrat du 14 octobre 1599². À moins d’un contrat postnuptial, c’est trop tard pour avoir un cinquième enfant né vers 1602, mais l’approximation lorsqu’il était question d’âge était alors la règle³.

Ainsi identifié, Louis est le neveu de Christophe de Beaujeu († 1636), dit le baron de Beaujeu et de Jaulges, fait maréchal de camps des armées du roi en 1614, passé en 1621 aide major de maréchal de camp au service d’Henri II, duc de Lorraine, dont les enfants décèderont sans descendance⁴, de Marie de Beaujeu, épouse de Jean de Moreau, de Denise, mariée à Jean Duban mort à la bataille d’Ivry, puis à Jean de Drouet, capitaine de chevau-légers, et de François de Beaujeu, mort également maréchal de camps des armées du roi.

Parmi les frères de Louis, notons Edme, l’aîné, seigneur de la Tuilerie et de Jaulges, marié à une fille de Nicolas de Baugy († 1641), fidèle agent de Richelieu servant comme diplomate, et Marc-Antoine, le benjamin, seigneur de Pouy, lieutenant des chevau-légers du duc d’Enghien en 1646, avant de passer capitaine au régiment de Beaujeu.

Si « Ludovic » sert dans le régiment d’Orléans, régiment de prestige, il n’y est pas officier, ce qui, à son âge supposé, indique une médiocre dotation et désigne nécessairement un cadet. Il est donné sans alliance et est omis dans la plupart des généalogies des Beaujeu alors qu’il est nommément cité dans les testaments de ses parents, notamment celui de son père en 1626. Notons que ce testament fut rédigé chez Claude de Moreau, son cousin (fils de Jean et de Marie de Beaujeu infra), qui avait épousé en premières noces Claude du Brouillard, cousine germaine de Jacques II du Brouillard, l’autre témoin à charge dans l’affaire qui est évoquée dans la lettre. On peut encore remarquer noter que les deux témoins ont des profils très similaires, ce sont des cadets de très bonnes maisons, ils sont voisins – Jaulges se trouve une petite trentaine de kilomètres au nord de Saint-Cyr-les-Colons – et ils sont donc apparentés. Jacques du Brouillard sera d’ailleurs le parrain d’un fils d’Edme de Beaujeu en 1649.

Beaujeu est interrogé comme témoin lors du procès d’Alexandre d’Halluin⁵, seigneur de Wailly, en mai 1632. Avec Jacques du Brouillard, baron de Saint-Cyr, ils témoignent de la proposition de Wailly à Gaston d’Orléans de faire assassiner Richelieu⁶.

Contrairement à Jacques du Brouillard, dont la carrière semble alors avoir pris son essor (voir sa notice), Louis ne semble pas avoir tiré parti de cet acte de loyauté envers le cardinal et était mort le 7 avril 1648, lors du règlement de la succession de ses parents, sans laisser de nouvelles traces⁷.

Voir également en plus des sources manuscrites de la Bibliothèque nationale : D^r Joseph Bertin, Les Beaujeu de Franche-Comté dans le duché de Bourgogne, l’Auxerrois, le Tonnerois, la Champagne, etc., Dijon, 1903 et Adolphe Mullot de Villenaut, Nobiliaire de Nivernois […], Nevers, 1900, p. 431, n. 2 « De Beaujeu ».

Texte 737,

Charles-Henri de Sommyèvre

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1. Aujourd’hui Beaujeu-Saint-Vallier-Pierrejux-et-Quitteur, à ne pas confondre avec Beaujeu (Rhône), capitale du Beaujolais qui eut également ses seigneurs particuliers. [↩]
2. Le testament de Jean de Beaujeu se trouve dans les Carrés de d’Hozier 72, « Beaujeu » f° 73. – Jean V de Beaujeu était donc le beau-frère de Paul-François de Beaujeu, seigneur de Villiers-Vineux  – voir ce nom -, qui avait épousé Anne de Saint-Blaise. D’une famille maintenue en Champagne en 1669, Catherine et Anne étaient filles d’Hector de Saint-Blaise – † av. le 22 juin 1606 -, seigneur de Pouy-sur-Vannes et de Lézinnes, député de la noblesse de Sens aux états généraux de 1593, et de Barbe de Monchy. [↩]
3. Le deuxième témoin, Jacques du Brouillard, est donné être né vers 1610 alors qu’en réalité, il a été baptisé en 1605, ce qui illustre bien notre propos. [↩]
4. Les biens de ce rameau aîné échurent aux enfants de Jean V de Beaujeu, ce qui explique que « Ludovic » se soit intitulé sieur de Jaulges alors que son père ne l’était pas. [↩]
5. Il était le dernier mâle d’une branche cadette de la famille ducale et avait hérité de son père, mort en 1630, de la charge de capitaine des gardes du duc d’Orléans. [↩]
6. Voir, au Ministère des Affaires étrangères, Archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires et Documents France, vol. 802, f° 190-192, les dépositions de témoins au procès de Wailly, à Paris, le 13 mai 1632, et vol. 802, f° 193-195 les interrogatoires menés lors du procès de Wailly, à Paris, 13 mai 1632, vol. 802, f° 196, le compte-rendu de la confrontation de Wailly avec Ludovic de Beaujeu, sieur de Jaulges, et Jacques du Brouillard, baron de Saint-Cyr, à Paris, 13 mai 1632. [↩]
7. Carrés de d’Hozier, « Beaujeu » f° 90. [↩]