Le maréchal de Vitry à Richelieu, Aix-en-Provence, 2 janvier 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires & Documents France, vol. 1702, f° 4-5. Original de la main d’un secrétaire, sauf la signature et la formule finale autographe. Texte original publié dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), La correspondance du cardinal de Richelieu : au faîte du pouvoir, l’année 1632, Paris, éditions L’Harmattan, 2007, p. 47-48.

Monseigneur,

Je ne vois point ici d’affaires particulières depuis mes dernières dépêches qui soient dignes de vous mander, sinon, comme je l’écris au Roi, qu’il n’est pas besoin de s’y affaiblir si fort, et que si j’eusse suivi mon sens et l’opinion que je puis prendre sur les lieux pour le maintien de son service comme il appartient, je n’eusse pas été d’avis de licencier la moitié des compagnies des quatre régiments qui y demeurent, pour ce, qu’avec la conduite et la dextérité, la puissance est une des choses qui porte autant de considération aux esprits de ces peuples, qui ne font que trop de fréquentes émotions, comme vous voyez que rien que la crainte ne réprime.

Néanmoins, me portant toujours à l’obéissance des commandements du Roi et des vôtres, par conséquent croyant bien qu’ils ne se font qu’avec votre avis, j’ai apporté, en cette occasion comme en toute autre, le respect qui y est dû, et soudain fait partir les régiments de Phalsbourg et Soycourt hors de la province pour aller aux lieux où le Roi les destine, et réduit aussi les compagnies à cinquante hommes des quatre autres régiments qui me restent, sans y perdre ni heure ni jour. J’ai pourvu aussi à leur subsistance avec le pays.

Et afin que je ne demeure en arrière sur la réponse du commandement que vous m’avez fait, Monseigneur, je vous dirais que le sieur de La Potherie est en mauvaise odeur en cette province, et fort inutile par conséquent, car rien n’y conserve l’autorité dans les charges que l’estime et la probité. Il voulut bien véritablement tenter la mienne pour le passage de certaines barges de Languedoc chargées de blé depuis la défense, disant qu’elles n’étaient de Provence. Mais je n’entends pas raillerie en telle matière pour quoi que ce soit.

Le sieur de Villy, présent porteur, bien informé des choses de cette province comme en étant, et affectionné au service du Roi de même, vous pourra dire tout plein de particularités qui la regardent, si vous lui faites l’honneur de lui commander, et moi encore en cet endroit que le consul Beaumont qui est revenu depuis peu de la cour, m’ayant dit vous avoir satisfait sur l’importance du château des Baux conformément à mes dépêches, qui, je crois, vous auront fait voir comme cette affaire est de considération pour cette province. Je vous supplie très humblement encore y faire celle qui est nécessaire pour le conserver dans la main du Roi, car l’intérêt particulier du même homme ci-dessus a beaucoup porté contre toute raison en cette affaire jusqu’ici par une promesse de trois mille écus que l’on tient, ne faisant rien pour rien que les habitants lui donnent des quatre, dont l’on augmentait la finance de leur engagement pour la démolition, la faisant pour rien, pour l’envie d’être maîtres d’un lieu aux dépens du pays, dont le Roi l’est maintenant, que je ne puis ajouter à celle-ci que la confirmation de mon service très humble à vos intérêts, et la puissance que vous aurez toute ma vie sur moi, étant avec toute sorte de justes sujets, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Vitry.

À Aix, ce 2^e janvier 1632.

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