Paul Scarron l’Apôtre ( ? ) à Richelieu, Paris, 6 janvier 1632.

Ministère des Affaires Étrangères, archives diplomatiques, centre de La Courneuve, coll. Mémoires & Documents France vol. 804, f^° 8. Original de la main d’un secrétaire. Texte original publié dans Marie-Catherine Vignal Souleyreau (éd.), La correspondance du cardinal de Richelieu : au faîte du pouvoir, l’année 1632, Paris, éditions L’Harmattan, 2007, p. 61-62.

Monseigneur,

Vous êtes si juste et si équitable que d’un autre du parlement, qui n’avait pas l’honneur d’être connu de vous, vous receviez favorablement ses justes excuses de n’avoir pas fait le voyage de Metz, et estimant que, dans le Parlement, vous n’y avez pas un plus ancien ni plus fidèle serviteur que moi, j’ose espérer de votre justice et de votre bonté, que vous approuverez entièrement les véritables raisons pour lesquelles je n’ai peu me mettre au hasard d’un si long et fâcheux voyage. M. le président de Bellièvre et M. Méliand, président en la chambre où je sers, vous les feront entendre si vous l’avez agréable. Ces deux très vertueux personnages savent l’indisposition d’un très grand rhume en laquelle je suis depuis trois semaines. Il ne me donne du repos qu’en une partie du jour, tout le reste du temps m’est un tourment continuel.

Aussi, Monseigneur, quand ci-devant certain nombre de conseillers a été commandé d’aller trouver le Roi, et lui et les Rois ses prédécesseurs n’ont pas trouvé mauvais, si aucuns s’en dispensaient par incommodité ou nécessaire empêchement, MM. de Bellièvre et Séguier, présidents en la grande chambre, et le dit sieur Méliand ont assisté aux délibérations faites en l’assemblée des chambres depuis le vingt-huitième novembre. Ils savent avec quelle retenue je parle ordinairement en ces assemblées, et toujours dans la révérence et dans les soumissions que je dois au Roi, que l’ai toujours cru devoir aussi rendre à ses principaux ministres. Plus volontiers j’ai fait envers vous, Monseigneur, y étant plus particulièrement obligé, et par devoir du service que je vous ai voué, et par la notoriété de votre mérite, et des heureux succès de vos généreux et très prudents conseils en toutes choses. Je ne me contente pas d’en parler et d’en dire mon sentiment parmi les compagnies privées. Ces trois Messieurs les présidents vous pourraient certifier de quelle affection et avec quel éloge j’en ai parlé par deux fois en nos dernières assemblées.

Je vous supplierai donc, Monseigneur, en toute humilité, me vouloir prendre en votre protection, en cas qu’on voulût rendre odieux ce que la nécessité m’a faite faire. Je vous en aurai extrême obligation pour laquelle je serai de nouveau excité et confirmé en la volonté que j’ai de si longtemps de demeurer à jamais, Monseigneur, votre très humble et très obéissant serviteur,

Scarron¹

À Paris, ce 6^me janvier de 1632.

1. Trois membres de la famille Scarron sont, à cette époque membre du parlement de Paris, et affectés à la chambre des Enquêtes : Paul Scarron l’Apôtre, le mieux connu ; mais aussi Jean Scarron, frère de l’évêque de Grenoble, Pierre Scarron, affecté à la 3e chambre des enquêtes puis promu en la Grand’Chambre à une date indéterminée ; et son homonyme Jean Scarron de Vaures, également reçu conseiller en la 3e chambre des enquêtes, neveu de Paul Scarron l’Apôtre. Voir Michel Popoff (pub.), Prosopographie des gens du parlement de Paris (1266-1753) : d’après les ms. Fr. 7553, 7554, 7555, 7555 bis conservés au Cabinet des manuscrits de la Bibliothèque nationale de France, Paris, le Léopard d’Or, 2003, 2 volumes, t. 2, p. 940-942. [↩]

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